Il arrive quelquefois que l’on tombe sur un album d’un groupe méconnu et qu’on découvre un monde de son si subtil et surprenant qu’on se sent d’abord un peu égaré. Puis d’écoute en écoute, on accroche et on découvre une oeuvre monumentale. C’est le cas avec ELECTRIC MUD, un duo allemand qui se définit comme ‘post-progressif’ c’est-à-dire puisant dans les racines et les éléments distinctifs du rock progressif classique mais l’emmenant plus loin en utilisant des instruments plus modernes. On se rappellera la citation de ROBERT FRIPP : ‘le rock progressif n’est pas un style mais une attitude’. Il s’agit d’un quatrième opus depuis 2015 ce qui suggère complicité et maturité. L’album est strictement instrumental et offre 15 pièces, le tout faisant presque 80 minutes.

Le traitement musical est assez original, à partir d’un thème souvent présenté par un instrument classique comme la guitare, le piano ou l’orgue on s’envole rapidement dans un paysage sonore immense et quasi-symphonique. Chaque détail est soigné, chaque arrangement délicat et démontrant une belle maîtrise de l’harmonisation et de la composition. La qualité de l’enregistrement et de la ‘mastérisation’ est superbe. Tout y est : les drones galactiques, les soli de guitares à la GILMOUR, les bruits de musique concrète, les synthés flottants ou lancinants, les variations de tempo, les signatures exotiques et j’en passe. Le véritable tour de force, tout comme pour une recette culinaire, c’est d’emmener tous les ingrédients ensemble dans un tout qui sublimera vos sens. HAGEN et NICO sont de grands chefs.

Mais la différence entre une oeuvre intrigante et une oeuvre magistrale en musique tient de la capacité d’émouvoir l’auditeur, de le faire vibrer dans un rêve de sentiments, de suspendre le temps. Et c’est ici que ‘Quiet Days On Earth’ prend tout son élan. Chaque morceau est un paysage différent d’un monde cohérent et étrangement beau. Tous les titres sont évocateurs : la solitude du somnambule, l’espace entre les ombres, aventures dans un monde liquide etc… Pour vous donner une juste idée, allez écouter des extraits sur ‘bandcamp’ ou les pièces qu’ils offrent en écoute sur YouTube (The Echoes of Acheron: un opus de style floydien et Aurora Moon un bel exemple de leur approche). J’ai particulièrement adoré ‘Mer de Glace’ avec son thème de boîte à musique cinématique. ‘Eyes Watching Sky’ avec ses grands orgues baroques en intro et son rythme mécanique est bien réussi. ‘Silhouettes Floating Down A Rain-Slicked Street’ offre un mellotron en duel avec un synthé en arpège puis des passages tout doux violon et xylophone, vous voyez le genre !

Bref, je vous laisse le plaisir de découvrir ce joyau qui sera dans ma liste des meilleurs albums prog de 2020. Il plaira à tout amateur de rock progressif symphonique, illuminera vos nuits avec des écouteurs et ébahira vos amis sur un système de son haute-fidélité. Dans la meilleure tradition progressive allemande pour toutes les bonnes raisons. Leur meilleur album à ce jour. Partagez le plaisir.