ENTREVUE / INTERVIEW
Francesco & The Black Swans
With: Francesco Buono
ALBUM REVIEW HERE
Alain Massard - May 2024
Profilprog (PP) : Bonjour ça fait plaisir de te laisser un temps de parole par mail interposé ; pour lancer le débat, peux-tu présenter le groupe, son origine ?
FaTBS(Francesco and The Black Swans ) : Bonjour Alain. Tout d'abord j'aimerais te remercier pour ton soutien envers ce projet. Francesco and The Black Swans est un projet qui a toujours été en moi. Certaines compositions datent d'il y a plusieurs années mais c'est en 2019 que j'ai eu le déclic, lorsqu'à la télévision française je voyais un fou qui écrasait les passants sur la promenade des Anglais à Nice. Il y avait ces poussettes renversées. En plus de profondément me choquer, cela m'a mené à me poser les questions suivantes "quelle est la place de l'enfant dans notre société ? Quelle est la condition de l'enfant dans les zones de conflits à travers le monde ? Quels sont les droits de l'enfant et quelle est sa place dans une société ou écraser le plus faible est normalisé ?''. J'avais cette introduction au piano qui raisonnait dans ma tête, j'ai pris ma guitare et le reste de la chanson m'est venue naturellement. C'était ''Set the children free''.
PP : Les autres musiciens, des amis(es), des guests, comment les as-tu rencontrés ?
FaTBS : Indria, qui est le bassiste du groupe ainsi que celui qui a mixé l'album, est un ami d'enfance. On s'est connu au collège. Notre amour pour la musique et le rugby nous a rapidement rapproché. Indria est une personne introvertie mais son intelligence d'esprit et de coeur est grande. Un jour, nous avons décidé de monter un groupe de rock avec deux amis ''Mathieu Trenc-Torres'' et ''Cyril Truffert''. On a tout fait pour qu'Indria se mette à la basse et nous rejoigne. Quelques semaines plus tard ce fut le cas et depuis il n'a jamais arrêté, il est à présent le bassiste d'Alcest.
Eric était dans un groupe que j'appréciais étant jeune. Ce groupe s'appelait ''Adagio''. Lors d'un concert, nous avons échangé. Des années plus tard, je le recroisais sur une date que nous avions en commun. Nous avons joué ensemble et nos routes ne se sont plus quittées. Eric est un moteur essentiel du groupe. Il apporte son expérience et son groove.
Harry, est un claviériste que j'apprécie. Il joue comme j'aime. Toujours de bon goût. Il est le contraire des musiciens qui débitent des notes par peur du silence. Juste avant la crise COVID, le fan club monde de Pink Floyd a partagé ma démo du titre ''Set the children free'' et l'engouement fût immédiat. J'ai décidé d'envoyer le titre à Harry qui a tout de suite adhérée au projet. Plus tard, lorsque je finalisais les compos de l'album, je le recontactais pour les lui envoyer. Il a tenu à apporter sa touche et le résultat me plaît.
PP : Venons-en à ton album ‘La Vie en Rose’...Une réalité, un pied de nez vis à vis du monde ambiant ?
FaTBS : La névrose sociétale est au cœur de ce projet. La Vie en Rose est un idéal vendu par une classe politique coupée de la réalité. Cette même réalité est tout le contraire d'une vie parfaite. On est placé dans une injonction paradoxale qui rend malade l'individu. Nous sommes le reflet de la société dans laquelle nous vivons.
Les gouvernants entrent dans le cœur des gens par les biais des médias, une part de bonheur dont on connait la cause. Les guerres ne sont que politique et conflits d'intérêts. Le peuple subit la petitesse de cœur de ces personnes qui pourraient tuer pour un mandat de plus.
Il est important que l'individu sublime ses pulsions destructrices en se concentrant sur l'amour que lui apporte ses proches (familles et/ou amis). Un individu soigné pourra aider à reconstruire une société saine.
PP : Si je te dis ‘The Wall’, tu ne vois aucun lien, tu aimerais qu’on parle d’autre chose, ou tu reconnais que c’est une pièce majeure ?
FaTBS : La Vie en Rose est un album concept qui suit une certaine chronologie, dictée par un narrateur omniscient. "La vie en Rose» est un tout, un "nous".
Chaque individu peut s’identifier à ce narrateur et à travers différentes situations de la vie souhaitée par la société dans laquelle nous vivons. Les névroses occasionnées par un certain dictat sociétal généralisé sont identifiées et traitées tout au long de l’album.
Un narrateur omniscient fait le lien entre chaque titre. Une voix à peine audible fait le lien entre chaque titre.
Si on regarde de plus prête ce chef d'œuvre qu'est ''The Wall''. Ce projet fait partie d’un projet concept vu sous trois formes. Le premier étant l’album, le second la représentation scénique et pour finir le long métrage avec un Bob Geldof magistral dans le rôle de Pink. ‘’The Wall’’ est aussi un opéra rock qui traite du thème de l'isolement et de ses conséquences mentales. Un fil conducteur lie les titres entre eux afin de former une histoire. Ce concept est totalement repris dans notre album ''La Vie en Rose'' dont le sujet est la névrose sociétale.
Je n'ai pas composé l'album en me disant qu'il fallait s'inspirer de tel ou tel groupe ou de tel ou tel album mais je dois admettre qu'une fois l'album terminé, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le lien entre ''La Vie en Rose'' et ''The Wall'' et sincèrement c'est plutôt flatteur.
PP : On avance et on parle plus particulièrement de l’album : quelle mouche t’a piqué de composer un album concept de rock progressif en 2024 ?
FaTBS : Avant tout, j'ai souhaité composer sur des sujets qui me touchent. Etant moi-même un grand névrosé, j'ai composé un album qui me ressemble. Chaque thème abordé tel que la condition de la femme et de l’enfant dans la société, la corruption politique, le consumérisme ou encore la perte d’identité sociale et culturelle chez l’individu, sont tirés d'une histoire plus ou moins directe.
Le squelette est donc la névrose sociétale. J'ai suivi ma vie de manière chronologique. Cette chronologie a constitué une histoire incluant chaque titre de l'album dans un ordre bien précis.
De nos jours, je trouve que la musique manque de cœur. Faire un tel album en 2024 c'était comme nager à contre-courant. Soit on coule, soit on avance et on survit. Penser plus loin que la masse peut aider à aller plus loin.
PP : Le chant, tu l’as voulu spleen ou avec espoir en fonction de la vie dans laquelle nous sommes plus ou moins englués ?
FaTBS : J'avais les paroles des chansons mais je n'avais jamais testé de poser ma voix avant l'enregistrement. J'ai chanté comme je le ressentais à l'instant T. Le but de ce projet est bel et bien de donner espoir à celle ou celui qui s'y plongera. Souvent nous regardons nos pieds en nous plaignant de choses futiles. Cette introspection permettra je l'espère à certain(e)s de retrouver un bonheur connu jadis.
A travers ma voix, j'ai tenté de servir le projet en ce sens.
PP : ‘La vie en rose’ vient de sortir dernièrement, as-tu un message d’espoir à nous dire pour qu’on saute dessus et qu’on l’écoute en album de chevet le soir ?
FaTBS : “L'espoir est le combustible que les hommes brûlent pour pouvoir vivre. Impossible de vivre sans espoir. Mais c'est comme une pièce qu'on jette en l'air. Pile ? Face ? On le saura quand elle sera retombée, pas avant.” - Haruki Murakami. Chaque titre de cet album est un fleuve d'émotions. Ces fleuves se rejoignent en un point donner afin de former un océan d'espoir. Il est important de se plonger dans cet album et d'en ressortir plus vivant que jamais.
PP : Quels sont les évènements traumatiques flagrants dans la construction de l’album ?
FaTBS : Les expériences de vie sont souvent traumatisantes pour un enfant qui tente de se construire. Cet album est un enfant qui a connu espoir, désespoir, motivation, dépit, colère, joie, peur, tristesse en un temps très limité. Les idées n'étaient pas simples à mettre sur papier dans un premier temps puis en musique. Certaines personnes ne comprenaient pas ce projet et nous avons dû nous séparer d'eux. La Covid a coupé l'élan insufflé par la première démo ''Set the children free''. La musique reste de la musique et il a fallu avancer et clore ce premier chapitre afin d'en ouvrir un nouveau bientôt.
PP : As-tu un titre préféré et lequel, toi qui as composé l’album ? Et pourquoi ?
FaTBS : Je n'ai pas de titre préféré car à chaque écoute mon avis change. J'aime bien ''Set the children free'' car il marque le commencement de l'aventure.
PP : Bon si tu n’as pas choisi ‘Mother’ peux-tu juste nous en parler ? (Morceau que j’ai choisi pour le solo guitare !)
FaTBS : Dans ce titre, j'ai voulu panser mon mal-être en me replongeant dans mon enfance. J'ai fait une analyse succincte des névroses infantiles causées par ma mère qui souffre de maladie mentale et qui était souvent absente. Je parle ainsi de situations qui ont conduit à cette enfance plutôt malheureuse. Ma mère était violente, obsédée par son image, elle nous maltraitait physiquement et moralement ma sœur et moi. Parfois elle nous donnait un peu de ce qu'on pensait être l'amour d'une mère pour ensuite tout reprendre et partir sans donner signe de vie. Ce flash-back m'a aidé à sortir cette colère que j'avais en moi.
Le solo de guitare est pensé comme une voix, d'ailleurs tous les solos de l'album sont pensés ainsi. J'ai été à contre-courant des guitaristes qui ont peur du vide et qui vomissent des centaines de notes à la seconde. Cette voix peut être celle de toute personne qui se plongera dans cet album.
PP : Allez une dernière, un retour sur la pochette, stp !?
FaTBS : La pochette représente une demoiselle (ma fille) qui regarde la montre du temps. Cette montre se désintègre au fur et à mesure que la terre est détruite par l'homme. Cette montre a des racines car lorsque l'humain ne sera plus, ces racines retourneront à la terre pour faire renaître la vie. Cette demoiselle tient un parapluie dans sa main droite afin de se protéger des larmes de douleurs que la névrose sociétale fait couler sur nos visages. Elle doit avancer sur un sentier de vie. Les bâtiments se confondent en arbres et les arbres se confondent en tombes vues sur les champs de batailles. Au loin on aperçoit une lumière plus forte qui représente l'espoir.
PP : Merci pour avoir pris le temps et jouer le jeu, de mon côté je me plonge disséquer ce bébé qui a le droit de vivre sans maladies et contraintes !
FaTBS : “Soyons reconnaissants aux personnes qui nous donnent du bonheur ; elles sont les charmants jardiniers par qui nos âmes sont fleuries.” Marcel Proust.
Merci à toi Alain de donner du bonheur aux gens qui chaque semaine découvre de nouveaux talents grâce à ta plume. Merci d'être passionné et d'aider les projets oubliés des grands médias.