La musique Avant-Prog, ou Rock in Opposition, restera toujours un style de musique que j'appréhende. Ce style de musique est comme ouvrir un sac à surprise; on ne sait jamais sur quoi tomber! J'avais déjà entendu parler de FRENCH TV avec “The Violence of Amateurs”, leur 5e album studio, au début des année 2000. Cet album était un pur délice de délire jazz rock avec une grosse dose de cartoon qui me faisait penser à MR BUNGLE. Je n'avais pas regardé s'ils avaient fait autre chose par la suite et quelle ne fut pas ma surprise de voir qu'ils ont sorti en novembre dernier leur 15e album et qu'ils fêtent leur 40e anniversaire !!!

Formé en 1983 à Louisville en Kentucky, FRENCH TV était composé au départ de Mike SARY, membre fondateur du groupe, à la basse, Stephen ROBERTS aux claviers, Fenner CASTNER à la batterie et Artie BRATTON aux guitares et leur premier album sorti en 1984. Au fil des années, SARY s'entoura de différents musiciens pour finalement avoir une formation stable depuis 2017, qui est constituée de Katsumi YONADA à la guitare, Patrick STRAWSER au clavier et Ludo FABRE au violon. Fenner CASTNER, faisant un retour après 30 ans, à la batterie, Warren DALE, qui est souvent dans l'aventure depuis 2001, au saxophone et Kenji IMAI à la flute terminent le lot de musiciens pour la nouvelle parution, « A Ghastly State of Affairs ».

Originalement sous le label « Pretentious Dinosaur Records », que SARY avait créé à l'époque pour publier ses précédents albums, c'est ‘’Cuneiform Records” qui le publie cette fois-ci; un label qui a un bon nombre de groupes ovnis sous son aile. Alors, le groupe a-t-il gardé la folie musicale d'antan?

En plus d'avoir un très long nom de chanson, « Every Morning I Wake Up and Take My Hat Off to All The Beauty in the World » est le plus long titre de l'album avec plus de 18 minutes au compteur. Débutant sur un air jazz fusion très calme avec des solos de IMAI à la flute et YONADA à la guitare, on se demande un peu si c'est le bon groupe qui joue; il faut dire que SARY et sa bande est habitué à déstabiliser ses auditeurs! Au fur et à mesure que la pièce défile, le rythme devient plus jazzy avec STRAWSER qui s'amuse au clavier, accompagné par les solos de YANADA, agrémenté de la basse de SARY et la batterie de CASTNER qui valsent autours d'eux pour ainsi former une belle union harmonieuse! Certains moments à mi-chemin me font penser à THE FLOWER KINGS, surtout dans l'album « Unfold the Future ». C'est effectivement une merveilleuse pièce pour débuter une journée, et l'album ici, qui me rappelle la célèbre « Morning Mood » qui entame l'œuvre classique « Peer Gynt » du compositeur Edvard GRIEG.

« Baby, You Fill Me With Inertia » change un peu la donne avec une rythmique jazz plus mouvementée, guidée par STRAWSER au clavier et le saxophone de DALE qui exécutent les solos à tour de rôle. Vers les 5 minutes, le rythme devient jazz funky endiablé avec tous les instruments qui éclatent des solos de partout, digne d'une belle orgie musicale! La musique complexe mais joyeuse tel un cirque est au rendez-vous pour les dernières minutes pour finalement se terminer en melting-pot de tout ce que l'on a entendu durant cette pièce; c'est exactement ce dont je parlais quand je mentionnais « ouvrir un sac à surprise »! « Drunkard's Train to Westchester » débute sur un air jazz plutôt rêveur avec le synthétiseur et le violon mis en avant pour ensuite devenir plus rock 80's avec la guitare qui s'ajoute à la fête à partir de la 2e minute. Le coté spatial guidé par le synthétiseur tient la ligne directrice tout le long de la pièce avec quelques instants bien ciblés pour la guitare, accompagnée par la basse qui rajoute un coté funky au voyage. « The Mayor of Ding Dong City » continue dans la même ligne jazz fusion avec quelques passages un peu plus éclatés rappelant à nouveau THE FLOWER KINGS à certains moments.

On termine avec « My Boys Awake At Night 'Cuz They Nocturnal » qui débute sur un air soft jazz apaisant la première minute pour ensuite poursuivre sur un style funky avec quelques délires comme seul le groupe sait faire. À 6 minutes de la pièce, FABRE prend le relais pour faire un long solo de violon qui n'est pas sans rappeler ceux de Jean-Luc PONTY pour ensuite aller vers un dernier virage musical à la MAHAVISHNU ORCHESTRA pour bien finir l'album.

Bien que les pièces soient beaucoup moins éclatées que les albums précédents, il faut dire que le groupe semble avoir toujours fait preuve de renouvellement entre chaque album. « A Ghastly State of Affairs » laisse tout de même place à une belle créativité artistique avec un penchant plus jazz cette fois-ci. Tous les musiciens ont leur place pour s'amuser dans ce beau terrain de jeu musical et la production rend justice à tous les instruments avec une sonorité impeccable pour chacun d'eux dans le mix final. Somme toute, c'est un album pouvant décevoir un peu les habitués des élans plus extravagants des parutions auparavant mais qui reste une belle porte d'entrée pour s'initier à ce monde fou mais équilibré à la fois.