Quelle belle découverte psychédélique ! De surcroît accessible. Je fus comme suspendue, devant cette effervescence sonore. D’où émerge une atmosphère spatiale aux concomitances “floydiennes”. Mon ouïe fut embarquée par ces effluves vintage rappelant un tant soit peu les beaux jours du groupe GONG dans des sonorités en moins excentriques, plus somptueuses, et voluptueuses de la scène Canterbury's proche également de CARAVAN, plus précisément de l'époque “If I Could Do it all Over again…” Mais, dès le début du répertoire des saccades enivrantes, combinées avec une basse envoûtante, hypnotique, convergent vers des notes radieuses, virevoltantes à souhait. L’ambiance y est “psyché”, surréaliste, tribale. À cela, j’ajoute des couches électros pour parfaire l’aspect cosmique. Ça... “vocode” à tout va ! si je puis m'exprimer ainsi. En veux-tu en voilà ! Le combo accentue la prosodie en juxtaposant des réverbérations de voix féminine. Sans être pour autant prosaïque ni cartomancienne, le mystique a certains attraits qui me sied. J’en conclus là, inopinément, pour la première carte du tarot de Marseille “The Fool” l'une des vingt-deux arcanes majeurs du tarot divinatoire. Voilà, à brûle pourpoint, un petit cliché éphémère de la thématique de l’album. Si, je vous ai donné l’eau à la bouche, j’en serais fort aise ! Toutefois, il serait opportun désormais d’apporter de l’eau au moulin concernant nos deux lascars catalans tout droit venus de Barcelone, si j’en crois les infos recueillies. Une anecdote aurait été rendue publique par le duo. Elle évoque l'épisode impliquant DAEVID ALLEN (cofondateur de Soft Machine et créateur de Gong).

Cela remonte en 2000 lorsque EVA MUNTADA (piano, synthé, orgue, Mellotron, vocals) et XAVI SANDOVAL (basse, guitares, mandoline, voix, sitar, backing vocals basse/ guitare) l’ont rencontré lors d’un festival à Canterbury où se produisaient GONG, CARAVAN et ARTHUR BROWN. Quelques décennies plus tard, le binôme se lance avec brio dans leur premier projet créatif. Ils choisissent, comme nom du groupe “Magick Brother & Mystic Sister“, en référence au premier titre du premier album de GONG. Cet événement fut source d'inspiration pour le combo puisqu'il s’enrichit de MARC TENA (batterie et chant) et de MAYA FERNÀNDEZ (flûte). Afin de donner vie au projet, Ils publient en 2020 leur premier album éponyme. Le quatuor sort de l’ombre, à la lumière d’une presse dithyrambique. Il aura fallu néanmoins quatre années de gestation pour que les espagnols de “MB&MS” accouchent d’un nouveau projet. Il a vu le jour sous le label grec “Sound Effect Record” le 29 mars 2024 titré “Tarot Part 1”. Ce sera le premier volet d'une série en deux parties. Ils s’inspirent notamment des cartes du tarot divinatoire des arcanes majeurs. Pour cette première partie onze cartes seront tirées. Auxquels sont associés onze morceaux plutôt ramassés représentant les cartes du tarot.

Mais, avant de me lancer dans la narration des divines cartes. Je souhaite vous faire partager une sensation controversée qui m’amène à cette réflexion. Certes, via ces quelques lignes vous y avez sûrement décelé un élan d'enthousiasme et d'euphorie. Une sensation tout à fait justifiée à l'égard de cette formation. Cependant, que ce fut difficile d’y plonger sans décrocher puis, d’en extraire matière à écrire. Pataugeant dans mon marasme linguistique, il a fallu être assidu, concentré. Il m’aura fallu énormément d’écoute. Est-ce une aphasie, une sorte de catharsis liée à l’extase de ces notes radieuses, virevoltantes, aériennes, cosmiques, relaxantes, oniriques, qui ont traversé mon lob frontal ? Ainsi inoculé, je fus perplexe, confuse, divergente, sans pouvoir y aligner le moindre mot. Aurai-je été plongée dans un songe ? Bref, un autre point m’interpelle. Est-ce une coïncidence, l’alignement des étoiles, une intervention divine ? aurait-elle guidé mon choix pour cette nouvelle découverte ? Quelle qu'en soit la raison, je suis heureuse d’avoir fait ce choix, ô combien judicieux. Cela m’a permis de me délecter d’un kaléidoscope sonore en tout point remarquable de la formation sis Catalogne. Un son rétro futuriste, folk, avec des accointances néo Canterbury psychédélique. Estampillé rock psychédélique/Space Rock. Avec autant de marqueurs seventies, j’espère sincèrement que vous n’imaginez pas que nos loustics seraient une pâle copie, un prog rétrograde de GONG ? Il n'en est rien, je vous en conjure ! Seul le nom du groupe est un indicatif et un hommage à leur aîné. Ils ont su au travers leurs influences musicales, leurs appétences, trouver leurs propres identités. Et qui plus est, leur empreinte sonore ne laissera personne indifférent.

Mais, voyons les cartes que nos hôtes ont tirées pour les convives. La première carte “The Fool” il faut se l’avouer, les jalons avait bien été posés dès l’album éponyme. On retrouve ici, ces sonorités psychédéliques moins déjantées certes, que leur aîné avec une touche cosmique, hypnotique, envoûtante, une orchestration conçue aux petits oignons de derrière les fagots. Wouah ! ça titille les esgourdes vers un voyage onirique. La seconde carte montre le magicien “The Wizard”. S'ouvre alors, un narratif et, à l'instar de “The Fool” emporte l’auditeur au pays des songes. La magie opère, l’ambiance psychédélique demeure. Subrepticement se dévoile à l'ouïe des phases éphémères, évanescentes, au piano, à la guitare, au mellotron trois minutes de rêve instantané. Le rêve se poursuit à l'écoute du troisième tirage “The High Priestess” Les réverbérations des voix féminines se superposent sur des séquences folk/médiévales de toute beauté. S’ensuit la quatrième carte “The Empress” les envoûtantes vocalises féminines se déclinent dans l’apaisement et la sérénité. Un moment de nostalgie captivant. S’enchaînent allègrement “The Emperor” trois minutes Canterbury’s, cinématographique aux réminiscences de CARAVAN. Quant à “The Hierophant”, les notes mystiques du sitar transcendées par les accords magiques de TONY JAGWAR dans un rythme effréné, apportent l’orient à portée de l’ouïe.

“The Lover”, les douces harmonies de la sitar évoquent à nouveau les sonorités sino -orientales. “The Chariot”, une fioriture de sonorités prog psyché, émerge le long de mon lob auditif. Ne serait-ce pas des réminiscences à “Sweet Smoke just a poke” combiné à la magie de la flûte de MAYA FERNÀNDEZ ? Une merveille d’exotisme. “The Justice” un dream prog Canterbury associé aux harmonies de la flûte et de la voix d’Eva. Épique ! ”The Hermit”, l’immersion dans un espace sonore méditatif, obscur et futuriste. Intrigant ! L'opus se conclut avec : ”The Wheel of Fortune”. Un final qui mêle sons et pulsations charnelles. Les combinaisons sonores évoquent une impression d’apesanteur, les voix masculines y sont feutrées et se réverbèrent à l'unisson. Nous sommes dans un tempo plutôt lent, les saccades derrière les fûts fluctuent. L’alchimie agit. La beauté des notes s’enchevêtre avec légèreté dans une atmosphère psyché cosmique. Une composition à la beauté formelle, comme le sont, l’ensemble des onze compositions merveilleusement orchestrées pour charmer vôtre ouïe et jouir de ses parements sensoriels. Puis, arrive le moment fatidique de la conclusion. Où demeurent sans réponse les sempiternelles supputations, interrogations ? Pourquoi n’ont-ils pas fait un double album part 1 et part 2 ? Est-ce le temps de digérer le premier ? Ou peut- être de faire grimper au rideau l’auditeur d’impatience ? Outre ces questions sans réponse, il me semble également avoir omis d'évoquer la virtuosité du combo, la symbiose qui en émane, condition sine qua none d’une bonne d'orchestration. Puis, le charme des vocalises d’Eva. J’en conclus là mes omissions. Enfin, pour l’avenir, sans l’ombre d'un doute, j’envisage un avenir prometteur pour les Catalans de MB&MS.