MAGORIA est un collectif batave qui rassemble de fines lames aiguisées pour l’instrumentation et des gosiers expressifs couvrant 4 octaves. Ces artistes sont rôdés par une solide expérience au sein de formations qui ont largement fait leur preuve comme, par exemple : KNIGHT AREA, EX LIBRIS, FINCH, SKEPFTUM, VALENTINE, SAFIRA, KAYAK, AYREON. Coupons court au raccourci facile, les thèmes qui sous-tendent les œuvres de MAGORIA ne baignent pas dans la science-fiction mais dans un passé macabre, parfois sanglant, toujours mystérieux. Le 25 octobre 2019, il était question des crimes - non résolus à ce jour – du XIXème siècle dans le quartier de Whitechapel à LONDRES. Ce double CD plongeait au cœur de cette affaire et avait été, fort justement, nommé « JtR 1988 (Jack The Ripper Rockopera) ».

Le 01 mars 2024 était soumis à notre curiosité/voracité « Hollingsworth Mansion ». Cette fois l’action se déroule sur une période bien supérieure ; du 11 décembre 1808 à l’année 1931. L’imposant bâtiment Hollingsworth Mansion est dévoré par les flammes (accident ou non ?) à la fin de l’année 1808, totalement détruit et ses habitants ont péri : Lavinia et Jefferso Hollingsworth ainsi que la mère Elizabet. Reconstruit en respectant les fastes d’antan, le manoir devient davantage prestigieux et les villageois l’appellent même le château. Plusieurs familles y ont emménagé, sans rester bien longtemps, alimentant les croyances, histoires de fantômes, ragots…En 1931 la famille Welbourne s’installe et conserve la gouvernante « d’époque » Selina Blackaby. Elle semble entre deux âge (pour les vivants) alors qu’en réalité (!) elle totaliserait 3 siècles et serait en relation étroite entre les deux mondes. Mr Howard Welbourne, homme d’affaire, entend les gérer au mieux loin de la ville trépidante. Mme Dolores Welbourne, artiste, espère trouver à la campagne une inspiration renouvelée. Reste la fille du couple ; Joanne, qui comme tous les enfants de 9 ans semble attirée par une porte qui mène à l’autre monde où l’attendent MR et Mme Hollingsworth, toujours en mal d’enfant. Que va-t-il advenir ?

Dès l’entame, « The Haunted House », le climat est posé ; mystérieux, menaçant, pesant, cinématographique. Plus engageant, « New Estate » matérialise avec entrain ce nouveau départ pour la famille Welbourne. « Don’t Open The Gate » - une mise en garde - donne la parole aux premier habitant du manoir, principalement Lavinia qui se montrera plus engageante dans « Diamond In The Dark ». Toutes les autres plages sont interprétées par des voix qui incarnent à merveille chaque personnage. Les ambiances et trames mélodiques changeantes, les rythmes variés, les chœurs majestueux et les arrangements élégants font de cet album un opéra rock de très haut niveau, comme il nous en arrive, finalement, assez peu. Les titres apportent, chacun, leur trame propre, faisant évoluer le récit d’un point de vue différent (8 en tout). L’alternance des atmosphères et des personnages concourent à une écoute attentive qui charme irrésistiblement. Quelques bruitages, une narration sur un ton pénétré “The House OF No One At All” ou un habillage théâtral « Enter In The Twilight World » caractérisent certaines compositions. Les échanges vocaux, passionnés, marquent les enjeux sur un motif orchestral riche et grandiose « I Can’t Restain Her Anymore ».

Y a-t-il une vie après la mort ? C’est la question posée dans « When Our Time Will Come ». Opéra oui, mais ROCK ! MAGORIA nous le rappelle dans “Leave Us” et “The Time As Come”. L’imposant « Die For The Love Of Your Life » est une débauche de chants avec une inspiration gospel légère mais bien présente et une montée en régime impressionnante. « Postludium », pièce instrumentale et monumentale, clôture « Hollingsworth Mansion » de manière pompeuse mais parfaitement adaptée.

Sans que je ne vous en dévoile trop (l’écoute, casque sur les oreilles, livret en main est LA clé, la seule) je pense avoir été le semeur des graines de la curiosité. MAGORIA réussit un nouveau coup de maître, et nous captive avec 15 pièces imparables et 66 minutes de bonheur passionné. Non seulement le récit est aussi dense et haletant que « JtR 1988 » mais encore Marc BOGERT (textes, composition, production) et Harmen KIEBOOM (textes) arrivent-ils, cette fois, à faire tenir le tout sur un seul CD. Un véritable tour de force qui exige un sens de la formule qui fait mouche et des orchestrations limpides et aérées.