MEER révélation du new prog en 2021; créé en 2008, huit musiciens dont la fratrie NESDAL aux vocaux polyphoniques, des instruments à cordes classiques, une pop orchestrale à la limite de la musique de chambre pompeuse; des clins d’œil aux FREQUENCY DRIFT, KEANE, MUSE, LEPROUS, The DEAR HUNTER et des BEATLES pour ces sonorités fraîches; un 3e album teinté de rock symphonique, classique, innovant et complexe; une petite bombe musicale encore avec des textes sur l’interaction compliquée des individus entre eux. Une musique envoûtante et sidérante.

« Chains of Changes » semble reprendre où l’album précédent s’était terminé : un piano, un synthé évanescent, un air western ambiant guitare; amplification des sonorités et le duo vocal fraternel se met en branle narrant leur histoire sur la crise des peuples; le tempo est posé, les choeurs typés sont aidés par l’orchestration avec le break à la BANKS; velouté, envahissant comme un pur produit de new prog pop rock. « Behave » basse sourde accompagnant Knut sur un air des TEARS FOR FEARS; morceau mettant en vedette les vocaux secondés des violons, la guitare amenant un son 80 revisité puissant; le développement break fait la part belle à l’orchestration avant le final apoplectique. « Take Me to the River » piano monolithique matinal, duo vocal éthéré fleurant LEPROUS, sur un air folk vintage lorgnant aussi WOBBLER, bourré de sensibilité; le break avec les instruments à cordes et l’air génésisien sur un son puissant, orgasmique et bucolique, facile et intense; final à l’orgue d’église rappelant les travaux de YES. « Come to Light » bis repetita avec cet air ambiant redondant, simplicité du piano, des voix; une douceur musicale, un bonbon de notes, le violon mélancolique aide à régresser, l’explosion des chœurs semblant provenir de l’éther; latence piano et pads qui se lancent dans le grand final optimiste avec ce refrain grandiloquent, frissonnant. « Golden Circle » entame dream pop par excellence, melting pot des SIMPLE MINDS, BRONSKI BEAT, EURYTHMICS; un rythme pop disco endiablé avec la guitare au riff saccadé ramenant au rock contemporain; le son se pose avec la voix veloutée. « To What End? » ambiance minimaliste, latente sur une pop fruitée; on parle de l’Eden, de liberté, de fin de guerre; la base rythmée syncope l’air faisant gonfler le morceau avec les chœurs noyés dans les violons, une véritable osmose son-voix-rythme qui hurle comme un puissant appel; les cordes se déclinent sur un climat langoureux progressiste avéré; retour au final redondant qui peut heurter par sa similitude.

« Today Tonight Tomorrow » avec Knut sur l’arpège piano; une comptine mélancolique amplifiée de notes délicates du piano et violons; un peu d’XTC, NO-MAN pour une exploration solennelle, triste, émouvante défiant la conception du tiroir prog; le solo guitare d’Eivind secondé des cordes épiques à souhait. « World of Wonder » pour l’interlude piano aux notes marquées; des chœurs éthérés provenant d’un monde de merveilles, instante cinématique réparatrice introduisant « Mother » avec le duo vocal plaintif, ode à la Mère, les instruments imprimant une aura divine; un air berceur enivrant, dans la lignée des BEATLES pour ce morceau mélancolique avec sa beauté éclatante, oxymore prégnant. « Something in the Water » me renvoie agréablement à ‘Playing House’ et son côté sombre mélancolique; évolution du timbre avec claviers et violons bien présents; la batterie imprime une atmosphère de marche militaire, le son enfle; les textes agressifs sur notre impuissance à se ressourcer, Johanne sort sa voix teigneuse pour nous prévenir une dernière fois. « This is the End » des DOORS, non le piano métronomique renvoie au djent d’HAKEN, l’envolée de cordes symphoniques assiste la guitare heavy électrique; Johanne puis Knut en duo intense qui peut déranger et cette guitare zeppelinienne entêtante, sulfureuse. L’arpège piano cristallin, douceur de l’errance du break spleen, instant contemplatif avant le final orchestral, mélange de tumulte et de riff provenant de l’orchestre dans sa globalité; espoir d’un nouvel envol.

MEER ou la musique dream pop alternative, avec sa beauté sidérale, c’est de moi; ces choeurs, ces envolées lyriques, ces instants de nostalgie conjugués aux moments solennels remplis de joie, d’émotion. Une musique inventive dès la première écoute, tout se mélange ensuite avec des redondances dans les morceaux puis l’explosion des titres séparément; le concert en live m’ayant fait virer à nouveau de bord. L’album explosif qu’il faudra écouter longtemps pour en sentir les harmonies complexes, écorchées vives. Un opus ambitieux, symphonique, moderne, je me répète, qui repousse au loin les airs usités du Prog, proposant ce voyage profond dans les veines du rock progressiste. Du cinématique, vocal, orchestral, un son hédonique, entraînant et puissant.