Cette époque troublée, chahutée, menaçante (politique inquiétante, guerres, évènements climatiques violents) ne participe en rien au moral du terrien moyen. La musique, nous le savons, peut-être un excellent refuge, une bulle dans laquelle s’isoler pour rester soi-même et respirer. Chance, il existe des formations comme ORESUND SPACE COLLECTIVE pour nous éloigner de la folie humaine et nous emmener loin, très loin, dans notre psyché pour un voyage exotique, magnifique, psychédélique, sans substance lysergique.

« Orgone Unicorn » est le 44ème effort discographique (32 studio, 12 live) d’un collectif à géométrie variable, ou, plutôt un rassemblement de talents mouvant qui, cela peut paraître exceptionnel, rassemble, de l’équipe de l’album précédent («Everyone Is Evil» 2023): Mattias OLSSON: batterie, congas, Mellotron, Poly D (clavier), Jonathan SEGEL: guitare, slide guitare, violon, Fender Rhodes, Luis SIMÕES: guitare, gong, noise box, Hasse HORRIGMOE: basse, Dr SPACE: orgue Hammond, Mellotron, synthé modulaire, octave cat (clavier), ARP Odyssey (clavier), Poly D (clavier) Avec, en renfort : Larry LUSH: Fender Rhodes, Mellotron, Martin WEAVER: boîtes à rythmes (Microfeek & Roland), KG WESTMAN (de retour depuis 2016): sitar, synthés, Mellotron. Vous l’aurez compris, avec une telle équipe et un pareil équipement, les possibilités sont nombreuses, pour ne pas dire infinies.

Infinies comme les astres du cosmos dans lequel OSC nous propulse avec un mélange de Space Rock Psychédélique (lorgnant parfois sur le Krautrock) avec des éléments Jazz prégnants et diverses influences moins prédominantes mais néanmoins présentes. Le grand écart entre les années 70 et les sonorités actuelles (et la technique tellement plus évoluée) est parfaitement contrôlé, avec une certaine maestria, pour un groupe de musiciens qui, au départ, versaient davantage dans les jam sessions. Leur propos est clairement maîtrisé et il nous apporte ce vent de fraîcheur bienvenu, un bol d’oxygène pur, substance enivrante à forte dose comme chacun le sait.

A la lecture de ces crédits, il apparaît clairement que OSC fait le grand écart entre les années 70 et notre triste année 2024. « Orgone Unicorn » par son inspiration apporte une respiration pour qui sait se laisser porter vers l’abstraction, au sens philosophique du terme. N’allez pas croire qu’ils se répètent ! De manière assez étonnante, les atmosphères, textures, thèmes mouvants, le plus souvent collectifs, relancent sans cesse l’intérêt. La longueur des pièces (de 18 à 28 minutes) n’est pas rédhibitoire dans ce cas. Elle permet de camper des couleurs différentes à l’instar des ragas indiens qui s’inscrivent dans un climat émotionnel donné. A titre d’exemple, la plage-titre est orientalisante grâce au sitar de KG WESTMAN, aux percussions de Mattias OLSSON et au climat particulier dans lequel baigne cette pièce.

Les autres pièces (7 réparties sur double CD ou vinyle) restent au même niveau, basculant d’une architecture à l’autre avec facilité, même si l’une ou l’autre phase, plus implexe, peut surprendre. C’est d’autant plus remarquable que l’aspect technique et la complexité passent au second plan lors de l’écoute pour des oreilles habituées à la création audacieuse. Les échanges guitares-batterie (aux patterns mouvants) se font sur les trames des synthés futuristes (Space Rock oblige). Un grand nombre d’instruments – aux sonorités particulières - viennent colorer l’ensemble et enrichir les plages. Dépaysement garanti !