Quand on parle de groupes polonais, on pense spontanément à Riverside (bien sûr), Collage, Amarok et Abraxas (les plus vieux d’entre-nous en tout cas !). ProAge nous vient en tête moins naturellement. Et bien le dernier album de ce quintette fondé en 1985, dissous en 1990 puis reformé en 2008, risque bien de propulser le groupe à l’avant-plan. En effet, « Purgatorium », leur 5e album, a tout ce qu’il faut pour plaire. Un son tantôt pesant, tantôt symphonique créant une texture prog des plus intéressantes. Suffit de s’habituer aux vocaux en polonais, une langue slave moins harmonieuse que l’italien, langue latine plus près de nous par exemple. Mais, après quelques minutes d’écoute, et grâce à la justesse de la voix de Mariusz FILOSEK, notre oreille se laisse finalement amadouer.

Au fil de départ, la pièce « Salve » nous accueille avec une salve (justement) de décibels mais c’est, à notre grande surprise, de courte durée parce qu’après 30 secondes, ce déferlement de notes se transforme soudain en douce mélodie qui désarçonne quelque peu. Puis, autre surprise, le rythme reprend de la vigueur avec un riff de guitare endiablé qui désarçonne à nouveau. Bref, on ne sait pas sur quel pied danser. Le tout n’est pas mauvais mais c’est comme si notre cerveau n’avait pas le temps d’assimiler ce que l’oreille lui envoi. Étrange sentiment j’avoue. Ce qui me fait dire que cette pièce, malgré ses qualités indéniables, n’est pas à sa place en ouverture de l’album, qui aurait dû commencer par la suivante, soit « Purgatorium I ».

Alors, parlons-en de « Purgatorium I ». Pièce épique de plus de 17 minutes, celle-ci nous démontre de belle façon le vrai visage de ProAge et ce qu’il a dans le ventre. Orgue Hammond et guitares s’en donnent ici à cœur joie et mettent la table à quelque chose de vraiment savoureux dans une suite de mouvements forts en intensité et liés par la voix surprenante et juste de FILOSEK. Certains passages d’inspiration médiévale où le clavecin se mêle au synthétiseur sont tout à fait magiques. Ici, les musiciens sont rois. Un long passage instrumental nous en donne pour notre argent. Krzysztof WALCZYK aux claviers et Slawek Yeahlon JELONEK à la guitare s’illustrent particulièrement.

« Purgatorium II » suit dans un tout autre registre. Toute en retenue, cette pièce très mélodieuse nous amène ailleurs. Piano, basse un peu jazzée et guitare prédominent chacun leur tour dans une espèce de fusion très néo prog, simple, efficace mais surtout harmonieuse, ce qui nous permet encore une fois d’apprécier les qualités vocales de Mariusz FILOSEK. Quatrième pièce en piste, « Purgatorium III » aurait fait un excellent « single ». Plus up-tempo, offrant une approche plus commerciale, elle n’en garde pas moins un petit côté vintage avec son orgue Hammond et son intense solo de guitare.

« Somnum » conclut l’album en beauté, ou presque. Percussions et basse ouvrent le bal avec aplomb. Piano et flute traversière suivent en solo ou en harmonie et nous bercent ici d’agréable façon. On y perçoit même des volutes à la IQ ! Petit bémol : la pièce se termine de manière plutôt abrupte, malheureusement, de sorte que deux ou trois minutes de plus auraient été grandement appréciées afin de terminer l’album sur une bonne note, c’est le cas de le dire.

Néanmoins, malgré cette fin un peu en queue de poisson, ‘’Purgatorium’’ est un album que je qualifierais de surprenant. Nous y retrouvons des musiciens bien en contrôle de leurs moyens et des compositions achevées et inspirées. Si la langue polonaise ne vous horripile pas trop, vous saurez apprécier cet album à sa juste valeur. Ce que j’ai fait !