Les amateurs de musique plus expérimentés se souviennent, avec un peu de nostalgie peut-être, d’une époque où la sortie du nouvel album d’un groupe phare ou d’un de nos favoris était un événement. L’avènement de l’ère numérique et des plates-formes d’écoute en ligne a sérieusement endommagé cette attente, ce rituel. Cependant, les amateurs de rock progressif aiment encore beaucoup la musique sur un support physique. Et parmi les artistes qui suscitent le plaisir de l’attente et de la nouveauté, on retrouve THE PINNEAPLE THIEF. Alors quoi de mieux que de commencer l’année avec le nouvel opus du groupe « It All Leads to This ».

Pour ce seizième album studio, le groupe est le même que depuis « Your Wilderness ». Soit le leader, chanteur et guitariste BRUCE SOORD, les vieux complices JOHN SYKES à la basse et aux voix et le claviériste STEVE KITCH. Et pour compléter le quatuor, on retrouve le maestro des fûts et des cymbales, GAVIN HARRISON. « It Leads to This » paraît deux ans après « Give it Back », ce qui est le rythme de parution du groupe depuis 2016. Une autre similitude est celle d’un album relativement court, quarante et une minutes, où l’on retrouve des morceaux efficaces et d’une durée qui varie entre quatre et six minutes. Vous l’aurez compris, vous n’entendrez pas de longues envolées instrumentales, qu’elles soient en solo ou collectives. Le quartet est au service des chansons.

D’emblée, la table est mise avec « Put It Right ». Un morceau calme, presqu’introspectif dirait-on. Une note de piano et la voix de SOORD, belle comme on l’aime. La rythmique intervient mais en retenue, en finesse. Dans ce morceau, comme à divers moments de l’album, les silences, brefs et bien utilisés, permettent de mettre l’accent sur une intervention vocale subséquente ou quelques notes de guitare glissées pour la texture, notamment. Un morceau doté d’une certaine fragilité comme THE PINNEAPLE THIEF et BRUCE SOORD osent et peuvent nous offrir. Même pour débuter un disque.

Avec « Rubicon », la guitare électrique intervient pour monter la tension et l’attention mais le groupe exerce une certaine retenue sur son effervescence électrique. Même sur des morceaux assez puissants comme « The Frost » ou « All That’s Left », les musiciens conservent un équilibre entre la force et le calme sur ces pièces typiques du groupe. Les sensibilités pop et rock alternatifs bien assumées de PINNEAPLE THIEF, mettent bien en relief les chansons offertes. La qualité des huit compositions de BRUCE SOORD est indéniable. Il mentionne d’ailleurs avoir été au-delà de ses limites, avantageux au niveau artistique mais plus difficile au niveau personnel.

Cette introspection sur fond d’incertitude est bien illustrée par une pochette qui offre un regard sur un monde postapocalyptique ou un lieu abandonné par la vie. La superbe vidéo du premier single « The Frost », tournée en Islande, est en phase avec les propos du chanteur. Ce dernier précise : ‘Conceptuellement, « It Leads To This » poursuit mon désir d’observer et d’essayer de donner un sens à la vie et au monde qui m’entoure. Tout est là dans les paroles.’

Chers lecteurs, chers auditeurs laissez-vous conquérir par les multiples univers du conteur et de ses acolytes musicaux. Ne cherchez pas les compositions alambiquées ou les feux d’artifice musicaux. Tout vous mène à savourer cette musique mariant astucieusement la force et la fragilité, le chaos contrôlé et la précision des musiciens. Tout vous mène au nouvel album de THE PINEAPLE THIEF.